La survie des organisations passe-t-elle par l’analyse prospective ?
Comment anticiper les évolutions technologiques pour ne pas être dépassés par nos concurrents et que nos produits ne soient pas obsolètes ? Comment détecter les nouveaux marchés qui peuvent créer de la croissance essentielle au maintien de l’activité? Comment anticiper les changements d’habitudes des consommateurs pour adapter nos offres aux nouveaux besoins ? Plusieurs questions qui se posent et auxquelles l’activité de prospective peut répondre.
La prospective, un outil d’anticipation indispensable
La prospective est définie dans le Larousse comme la « science ayant pour objet l’étude des causes techniques, scientifiques, économiques et sociales qui accélèrent l’évolution du monde moderne, et la prévision des situations qui pourraient découler de leurs influences conjuguées. » Pour un acteur, il ne s’agit pas de prédire l’avenir mais plutôt de prendre conscience de son environnement, des moyens dont il dispose, maîtriser les enjeux futurs pour pouvoir mieux prendre une décision. Pour Gaston Berger (fondateur de la prospective), « agir à long terme suppose de comprendre l’avenir et non pas de l’imaginer.[1] »
Cette activité qui découle de la veille permet d’anticiper en amont ce qui pourrait se produire à un horizon donné. En intelligence économique, la prospective peut permettre à une organisation de planifier son action en tenant compte des évolutions futures de son environnement. Il s’agit donc d’un outil pour construire la vision stratégique d’une organisation, d’une personne ou d’un groupe de personne.
Pas de prospective sans veille
La veille « vise à la surveillance et au recueil d’informations dans des domaines précis considérés comme stratégiques afin d’alimenter le processus décisionnel des entreprises et des Etats[2]. » Son rôle consiste à fournir des éléments d’aide à la décision et peut porter sur différents domaines : technologique, réglementaire, concurrentielle, image,… Etre en veille permet à un acteur de mieux comprendre son environnement, connaitre son marché et ses concurrents, se tenir informé des innovations. Il s’agit donc d’un point de départ essentiel au démarrage d’une analyse prospective puisqu’il est nécessaire de disposer d’un état de l’art avant de dégager des tendances ou de détecter des signaux qui pourraient représenter une menace future ou une disruption du marché.
La faillite de Kodak
Le cas de Kodak est l’exemple le plus marquant du 20ème siècle et illustrant au mieux la disruption technologique ayant conduit à la disparition d’un leader mondial. Leader incontesté de la photographie depuis sa création jusqu’aux années 1990, Kodak a régné sur le secteur grâce à sa pellicule argentique. L’émergence des technologies numériques dans la photographie n’a pas été saisie par Kodak. La passivité de la société américaine a conduit à sa disparition laissant ainsi place aux nouveaux entrants asiatiques sur le marché américain (notamment Canon, Nikon, Sony et Panasonic), Kodak ayant pris trop tard le virage du numérique. En 2012, l’entreprise demande la protection du chapitre 11 de la loi américaine des faillites[3]. Le sentiment de puissance, le manque de connaissance sur les concurrents, l’anticipation du changement des habitudes chez les consommateurs sont autant d’éléments qui peuvent expliquer la faillite de l’entreprise. La mise en place d’une démarche prospectiviste aurait pu fournir des éléments d’information stratégiques aux responsables de Kodak pour anticiper les pertes de parts de marché et garantir la « survie » de l’entreprise face à la concurrence asiatique.
Conclusion
La prospective est avant tout un outil, une méthode. Elle offre aux acteurs un outil pour anticiper les menaces et/ou les grands changements futurs en établissant, à partir d’un état des lieux de l’environnement (concurrentiel, marché ou réglementaire), les scénarii futurs qui peuvent se présenter à un horizon donné. Elle doit être menée avec beaucoup de rigueur et de sens critique. Elle peut engager une entreprise ou un groupe de personnes dans ses actions futures et doit donc être opérée par des analystes ayant du recul par rapport aux politiques internes d’un groupe (entreprise ou personne).
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[1] https://www.lemonde.fr/idees/article/2011/07/04/gaston-berger-inventeur-de-la-prospective_1544297_3232.html
[2] Définition de la veille sur le Portail IE, https://portail-ie.fr/resource/glossary/57/veille
[3] https://www.capital.fr/economie-politique/kodak-splendeur-et-decadence-d-un-empire-913548