L’indispensable opérationnalisation de l’intelligence économique dans la conquête de marchés
Au lendemain des crises successives traversées par nos économies, les décideurs sont plus que jamais conscients des enjeux des interconnexions des économies et des vulnérabilités de dépendances. Face à ce constat, l’intelligence économique s’érige en tour de contrôle leur permettant de monitorer leur environnement, de comprendre ses mutations et d’orienter leur prise de décision pour détecter des relais de croissances et niches de positionnement. La discipline et ses méthodes restent néanmoins méconnues, et les outils qu’elle offre peu ou mal implémentés. D’où la nécessité d’associer l’intelligence économique à des concepts connus du monde professionnel pour mettre en évidence son apport au renforcement de la compétitivité.
L’intelligence économique pour surveiller un marché en constant mouvement
La veille stratégique est une discipline d’intelligence économique qui vise à surveiller, humainement et technologiquement, des sujets définis dans un périmètre donné. La structuration de l’approche au sein de l’organisation permet d’établir, en interne, les sujets de marché qui dimensionnent la formulation de l’offre commerciale afin de pouvoir construire et développer un produit market-fit. Ainsi, les habitudes de consommation, les données sociodémographiques, les mouvements de la concurrence ainsi que les données de marché sont des paramètres qui doivent faire l’objet d’une surveillance afin d’alimenter la décision des responsables du développement du produit mais également des équipes de support qui vont faciliter sa commercialisation et sa notoriété auprès du public cible.
Cette démarche peut rejoindre l’étude de marché assez communément pratiquée en entreprise et la nourrir, mais va plus loin dans le sens où elle est continue.
A l’inverse d’une photographie figée, l’idée ici est de pouvoir régulièrement suivre les développements d’un marché pour être présent sur le champ tactique et tirer profit des opportunités créées par les possibles mutations. Plus encore, la systématisation de la pratique inclut la gestion de cette connaissance et sa transmission au bon moment au bon poste afin de tirer profit de l’opportunité qu’elle peut représenter, on parle alors de knowledge management (KM), indispensable à l’activation du cerveau collectif de l’organisation.
L’anticipation en préparation à l’action
Si l’intelligence économique facilite la réaction de l’organisation face aux mutations de marchés constatées, elle permet surtout de mettre l’organisation à l’avant-garde au travers de la détection de signaux faibles et d’anticipation de changements.
Prenons l’exemple de la veille réglementaire où, en réalisant un monitoring continu des législations, réglementations, normes et procédures dans un périmètre donné, il est possible à l’organisation d’anticiper en amont (dans le cadre d’une proposition de loi) afin de pouvoir positionner son offre en priorité sur le marché. La directive européenne sur le devoir de vigilance, adoptée par les instances européennes début juin 2023, devrait ainsi contraindre les entreprises de l’Union à s’assurer de la conformité ESG de leurs produits et de leurs fournisseurs. Cette directive pourrait avoir des conséquences lourdes sur les partenaires de l’UE. Ainsi, les premiers pays à avoir réalisé une mise à niveau de l’ESG de leurs exportateurs seront les plus prompts à récupérer des parts de marché et renforcer leur offre sur le marché européen. Du côté des entreprises européennes, plusieurs entités ont systématisé une autre activité de l’intelligence économique, la Due Diligence extra-financière, qui leur permet de s’assurer que leurs fournisseurs, au moins au premier niveau, sont en conformité aux standards européens ESG.
Ainsi, que cela soit en amont ou en aval, l’intelligence économique est plus que jamais un outil de compétitivité pour les organisations qui peuvent s’appuyer sur ses méthodes pour accroitre leur connaissance du marché et anticiper ses mutations.