Veille stratégique et Intelligence Economique, outils d’anticipation dans un environnement incertain
Les estimations de croissance pour l’année 2022 démontrent d’une reprise économique au niveau mondial. Selon le FMI, le T3-2022 s’est distingué par une résilience de la croissance économique. Cela est dû « à la vigueur du marché du travail, la bonne tenue de la consommation des ménages et des investissements des entreprises, ainsi qu’une adaptation qui s’est révélée plus solide que prévu à la crise énergétique en Europe. [1] » Toujours selon les projections du FMI[2], la croissance économique devrait atteindre 3.4% en 2022. En 2023, elle ralentira à 2.9%. Elle passera à 3.1% en 2024 marquant ainsi un retour à une situation économique mondiale plus stable.
La croissance en 2023 sera portée par le Chine. La reprise de l’activité économique avec la levée des restrictions sanitaires permettra au pays d’atteindre une croissance de 5.2% en 2023. Il s’agit, bien évidemment, de projections qui peuvent changer si de nouvelles perturbations apparaissent comme une escalade dans le conflit militaire russo-ukrainien, une perturbation des chaines d’approvisionnement, la dégradation de la situation sanitaire en Chine, la reprise de la guerre commerciale entre Etats-Unis et Chine,… La Banque Mondiale avertit que toute évolution défavorable de la situation économique « pourrait faire entrer l’économie mondiale en récession.[3] »
Toutefois, il faudra faire attention à l’inflation globale et plus particulièrement au sein de l’Union européenne et aux Etats-Unis, qui atteindra respectivement, en 2023, +5.6% et +4.4%. Ces deux zones enregistreront également une récession[4] en 2023 selon les analystes de la banque française BNP Paribas : -0.1% aux Etats-Unis (du fait du relèvement des taux d’intérêt par la Réserve fédérale) et -0.5% dans la zone Euro (du fait de l’augmentation du prix de l’énergie et du durcissement de la politique monétaire de la BCE). Ce scénario est confirmé par le directeur des investissements, Europe, Moyen-Orient et Afrique du gestionnaire d’actifs Morningstar qui déclare que la « récession semble le scénario le plus probable pour de nombreux pays.[5] » La banque Morgan Stanley prévient qu’une « inflation durablement élevée pourrait constituer un risque supplémentaire pour les marges des entreprises en 2023.[6] » Toutefois, le doute persiste. La banque Goldman Sachs prévoit que la zone Euro enregistre une croissance de +0.6% en 2023 suite à la réouverture du marché chinois et la baisse du prix du gaz naturel[7]. Selon la banque, l’inflation sera de 3.25% en 2023 dans la zone Euro.
Ainsi, en 2023, nous assisterons à une inflation globale et à une hausse des taux directeurs des banques centrales. Le 2 février 2023, la BCE a décidé de relever d’un demi-point ses taux. Il s’agit de la cinquième hausse consécutive depuis juillet 2022. Cette hausse devrait se maintenir à l’avenir. Dans un communiqué, la BCE indique que « le Conseil des gouverneurs continuera d’augmenter sensiblement les taux d’intérêt à un rythme régulier et de les maintenir à des niveaux suffisamment restrictifs pour assurer un retour au plus tôt de l’inflation vers son objectif de 2 % à moyen terme.[8] » La prochaine hausse est prévue pour le 16 mars 2023.
Le 1 février 2023, la FED américaine a augmenté son taux d’intérêt de 0.25 points. Il s’agit de la huitième hausse d’affilée qui situe les taux de la Fed dans une fourchette de 4,50 à 4,75%[9]. La banque fédérale américaine envisage d’autres hausses. Jerome Powell, le Président de la Réserve Fédérale indique « l’inflation a un peu ralenti mais reste élevée » reconnaissant un début de déflation mais qu’elle prendra du temps[10].
Les années 2022 et 2023 semblent marquées par accélération des prix qui impacte à la hausse les couts de production : matières premières, énergie, salaires,… et induit donc une érosion du pouvoir d’achat des consommateurs et des ménages. Les banques centrales procèdent (et procéderont) à une hausse des taux d’intérêt pour juguler cette inflation conduisant à un renchérissement du crédit ce qui risque d’impacter les investissements à la baisse.
Dans ce contexte économique difficile, les organisations doivent adapter leur stratégie et leur positionnement pour maintenir leurs activités et garantir leur survie.
Pour ce faire, le suivi de l’environnement dans lequel elles évoluent est indispensable à travers un monitoring de la situation économique et de ses impacts sociaux sur les ménages et les entreprises. L’objectif est de maitriser leur environnement économique et sociétal et d’anticiper les évolutions futures à travers une approche prospectiviste (veille prospective). En effet, toute crise conduit à des changements. La mise en place d’une veille prospective sur les nouvelles habitudes de consommation, les nouveaux secteurs d’activités, et les méthodes de travail, peut répondre à cette problématique.
Les changements qu’ont connues les entreprises vont conduire à un changement d’objectifs, et donc à une adaptation de la stratégie. Il devient donc nécessaire de monitorer les risques (et de détecter les nouveaux risques qui apparaissent), tout en essayant de les mitiger pour atteindre ses objectifs stratégiques.
La diversification de l’activité est également une solution qui s’offre aux entreprises. Elle nécessite toutefois de disposer de connaissances suffisantes sur le nouveau marché à attaquer, de préparer son offre et son produit pour mieux pénétrer ce marché, ainsi que de détecter les signaux d’affaires qui se présentent. A titre d’exemple, Dassault Système (éditeur de logiciel français), a vu son activité dans la santé devenir « son premier secteur », en croissance, au dernier trimestre 2022[11]. L’entreprise a entamé sa diversification en 2014. Le market research est une activité qui peut répondre à ce besoin de même que la mise en place d’une veille sectorielle, permettant de remonter ces signaux d’affaires.
L’acquisition de nouvelles entités pouvant se positionner dans une partie de la chaine de valeur d’un nouvel écosystème (start-up, entreprises technologiques, développeurs de solutions,… ou toute autre entreprise disposant d’un service ou produit innovant) peut offrir des capacités de diversification. Tout projet d’acquisition doit faire l’objet d’une due diligence à même d’affiner les connaissances sur l’entité ciblée (objet de l’acquisition) et de neutraliser l’exposition à un risque moralité ou réputationnel.
[1] www.imf.org/en/Blogs/Articles/2023/01/30/global-economy-to-slow-further-amid-signs-of-resilience-and-china-re-opening
[2] www.imf.org/en/Publications/WEO/Issues/2023/01/31/world-economic-outlook-update-january-2023
[3] Banque Mondiale, Global Economic Prospects, Janvier 2023
[4] https://economic-research.bnpparibas.com/html/fr-FR/Scenario-economique-02/01/2023,48081
[5] www.morningstar.fr/fr/news/230043/comment-faire-face-%C3%A0-une-r%C3%A9cession.aspx
[6] www.morningstar.fr/fr/news/230135/linflation-risque-majeur-pour-les-entreprises-en-2023.aspx
[7] www.reuters.com/markets/europe/goldman-sachs-no-longer-expects-recession-euro-zone-2023-2023-01-10
[8] www.ecb.europa.eu/press/pr/date/2023/html/ecb.mp230202~08a972ac76.fr.html
[9] www.federalreserve.gov/newsevents/pressreleases/monetary20230201a.htm
[10] www.cnbc.com/2023/02/07/fed-chief-powell-says-the-the-disinflationary-process-has-begun-but-has-a-long-way-to-go.html
[11] www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/dassault-systemes-decolle-dans-le-secteur-de-la-sante-1903149